Les crues éclair, également connues sous le nom d’inondations soudaines ou flash floods en anglais, sont un événement météorologique très dangereux. La raison en est la rapidité, la violence et la relative imprévisibilité avec lesquelles elles se déclenchent, ce qui fait que le temps pour activer les protocoles d’urgence est très limité.
Mais en sachant ce qu’elles sont et comment elles se développent, nous pouvons mettre en œuvre des mécanismes qui contribuent à en réduire les effets. Après tout, plus vous en savez sur votre adversaire, plus vous pouvez mettre en place les ressources nécessaires pour y faire face.
Crues soudaines : connaître l’ennemi
Les crues éclair, selon la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA), correspondent à des montées rapides des eaux dans les cours d’eau ou les ruisseaux au-dessus du niveau de crue. Il s’agit d’un phénomène fréquent dans les zones montagneuses soumises à de fortes précipitations ou à une fonte rapide des neiges, ou dans les zones normalement sèches. En effet, dans le cas de l’Europe, les 3 zones ayant le plus fort potentiel de déclenchement de ce phénomène sont (1).
- La région méditerranéenne, où les oueds généralement secs sont particulièrement importants. En effet, on estime qu’environ 70 % des systèmes fluviaux du sud et de l’est de l’Espagne sont des cours d’eau éphémères (2).
- La région alpine méditerranéenne, caractérisée par un terrain accidenté.
- L’arrière-pays de l’Europe continentale.
Cependant, il doit être clair qu’une crue soudaine peut se produire presque partout, depuis un environnement naturel jusqu’à une zone urbaine dont le système d’égouts est submergé par de fortes précipitations.
Pourquoi les crues soudaines sont-elles si dangereuses ?
Ces inondations torrentielles sont naturellement rapides, destructrices et imprévisibles. Elles se produisent généralement en moins de 6 heures. Toutefois, cette durée est conditionnée par l’environnement ou l’événement déclencheur, comme nous le verrons plus loin.
Ces caractéristiques font que les délais de réaction sont très courts. En conséquence, ces crues rapides entraînent des pertes considérables, tant matérielles qu’humaines dans de nombreux cas. A titre d’exemple, on peut citer les plus de 3 milliards d’euros dans l’Aude en 1999 ou les 1,2 milliards d’euros de pertes causées par les crues subites dans le département français du Gard en 2002, sur lesquelles nous reviendrons un peu plus en détail par la suite.
Conditions et situations qui augmentent le risque d’inondation par la foudre
Parmi les principales circonstances et épisodes qui augmentent le risque d’inondations torrentielles, on peut distinguer :
- L’orographie du terrain, en particulier les zones à fortes pentes, qui détermine la vitesse que l’eau peut atteindre.
- Densité de la végétation, qui contribue souvent à réduire la quantité d’eau s’écoulant librement sur une surface.
- Les fortes précipitations résultant de processus convectifs. Le risque est accru si la zone présente des accumulations de neige sujettes à une fonte rapide ou s’il existe une sorte de barrage artificiel ou naturel qui, le moment venu, se rompt et libère un grand volume d’eau, comme cela peut se produire dans le cas des lacs glaciaires.
- Les défaillances des infrastructures hydrauliques qui conduisent à leur rupture.
- La capacité d’absorption du sol, qui peut être saturé par les pluies précédentes. En ce qui concerne ce facteur conditionnant, il convient de mentionner en particulier l’effet imperméabilisant que les incendies de forêt ont tendance à générer ou la présence de revêtements non poreux qui facilitent le ruissellement.
Toutes ces situations, qui peuvent se produire isolément ou ensemble, font de la surveillance des cours d’eau une tâche fondamentale, en particulier dans les zones les plus menacées.
À cet égard, des programmes de surveillance tels que Copernic et l’European Flood Awareness System (EFAS) ont amélioré la disponibilité des données. Cependant, une grande partie des flashs floods sont limités à des zones de moins de 500 km2 et à de nombreux bassins qui ne dépassent pas 100 km2, comme le signalent Penna, Borga & Zoccatelli (4). Dans ces zones, il est donc utile de compléter les informations satellitaires par des données provenant de systèmes de contrôle au sol.
C’est précisément ce que font les réseaux de surveillance installés par Arantec sur la Garonne ou le bassin du Sió. L’intensité croissante des phénomènes météorologiques extrêmes fait de ces systèmes un élément très important des stratégies de gestion des urgences. C’est un aspect qui a déjà été mis en évidence, par exemple, le projet européen ANYWHERE auquel a participé Arantec. Après tout, outre la fonction d’alerte rapide, ils collectent également des données qui permettent d’analyser plus en détail les particularités de chaque événement. Et ce travail, fondamental pour mieux comprendre comment se produisent les inondations éclair, est un besoin qui, à ce jour, ne peut pas être entrepris dans de nombreuses régions en raison d’un manque de surveillance (5).
Les inondations éclair qui ont marqué un avant et un après : apprendre des erreurs
L’objectif de cette rubrique n’est pas de recourir à la morbidité, mais d’apprendre. Après tout, les épisodes d’avenues torrentielles offrent également des leçons précieuses et leur analyse contribue à la connaissance des circonstances qui les déclenchent.
Nous allons donc passer brièvement en revue certains de ces phénomènes qui font déjà partie de l’histoire collective de nombreuses villes et villages.
Montserrat (Catalogne), 10 juin 2000
Le 10 juin 2000, de très fortes pluies concentrées sur les bassins des rivières Llobregat, Besós, Francolí et Riera de la Bisbal ont provoqué de graves inondations, des glissements de terrain et desavalanches de débris (debris flows). Les dégâts les plus notables ont été enregistrés dans les environs du monastère de Montserrat (720 m.s.n.m.), où plusieurs infrastructures ont été détruites par la force de l’eau et 500 personnes ont dû être évacuées d’urgence.
Les précipitations enregistrées lors de cet événement se distinguent par leur intensité, avec de nombreuses localités dépassant 100 mm en 1 heure et une quantité maximale cumulée de 224 mm en moins de 24 heures (6).
Comme on peut le voir dans la vidéo ci-jointe, le phénomène provient d’un système convectif détecté dans la nuit du 9 juin qui a été renforcé par la présence d’air chaud et humide près de la surface terrestre.
Cet événement a entraîné des pertes estimées à plus de 65 millions d’euros et cinq décès.
Départament du Gard (France), 8-9 septembre 2002
Cet épisode d’inondations soudaines est le résultat d’un système de convection de mésoescala, considéré dans certains forums comme la « reine des tempêtes » et qui se forme généralement sur l’arc méditerranéen.
Comme le précise Delrieu et al (6), les bulletins d’information publiés par Meteo France, en raison de la faible résolution des informations, ont sous-estimé la quantité de précipitations et prédit de manière erronée la position de la tempête, la déplaçant de 100 km. En fait, les précipitations liées à cet événement sont parmi les plus élevées de la région, avec des valeurs maximales en 24 heures de 600-700 mm.
Ces inondations, comme nous l’avons déjà mentionné, ont causé des pertes de 1,2 milliard d’euros, faisant 24 victimes.
Conclusion
Les crues éclair sont l’un des phénomènes les plus destructeurs, en particulier dans la région méditerranéenne. La rapidité avec laquelle elles se déclenchent, la difficulté de les prévoir et la force qu’elles libèrent font de la surveillance par satellite, complétée par des systèmes de contrôle des bassins, l’un des mécanismes de surveillance les plus efficaces.
Les solutions que nous proposons chez Arantec n’empêchent pas les inondations, une possibilité qui n’est à la portée que de mesures structurelles coûteuses. Mais les mesures non structurelles telles que notre SmartyRiver peuvent également contribuer à sauver de nombreuses vies.
Sources consultées
- (1) Norbiato, D.; Borga, M.; Degli Esposti, S.; Gaume, E.; Anquetin, S. (2008). Flash flood warning based on rainfall thresholds and soil moisture conditions: An assessment for gauged and ungauged basins. Journal of Hydrology 362(3-4), 274–290. https://doi.org/10.1016/j.jhydrol.2008.08.023
- (2) Camarasa-Belmonte, A.M. 2021.Flash-flooding of ephemeral streams in the context of climate change. Cuadernos de Investigación Geográfica 47, http://doi.org/10.18172/cig.4838
- (3) Saraswat, C., Kumar, P., & Mishra, B. K. (2016). Assessment of stormwater runoff management practices and governance under climate change and urbanization: An analysis of Bangkok, Hanoi and Tokyo. Environmental Science and Policy, Vol. 64, pp. 101–117. https://doi.org/10.1016/j.envsci.2016.06.018
- (4) Penna, D., Borga, M., & Zoccatelli, D. (2013). 7.9 Analysis of Flash-Flood Runoff Response, with Examples from Major European Events. Treatise On Geomorphology, 95-104. https://doi.org/10.1016/B978-0-12-374739-6.00153-6
- (5) Gaume, E., Bain, V., Bernardara, P., Newinger, O., Barbuc, M., & Bateman, A. et al. (2009). A compilation of data on European flash floods. Journal Of Hydrology, 367(1-2), 70-78. https://doi.org/10.1016/j.jhydrol.2008.12.028
- (6) Llasat, M., Rigo, T., & Barriendos, M. (2003). The «Montserrat-2000» flash-flood event: a comparison with the floods that have occurred in the northeastern Iberian Peninsula since the 14th century. International Journal Of Climatology, 23(4), 453-469. https://doi.org/10.1002/joc.888
- (7) Delrieu, G., Nicol, J., Yates, E., Kirstetter, P., Creutin, J., & Anquetin, S. et al. (2005). The Catastrophic Flash-Flood Event of 8–9 September 2002 in the Gard Region, France: A First Case Study for the Cévennes–Vivarais Mediterranean Hydrometeorological Observatory. Journal Of Hydrometeorology, 6(1), 34-52. https://doi.org/10.1175/JHM-400.1
- (8) Gaume, E., Livet, M., Desbordes, M., & Villeneuve, J. (2004). Hydrological analysis of the river Aude, France, flash flood on 12 and 13 November 1999. Journal Of Hydrology, 286(1-4), 135-154. https://doi.org/10.1016/j.jhydrol.2003.09.015